mardi 27 avril 2010

L'Irlande et les femmes


Joanne Hayes, à droite


Un groupe d'hommes, certains portant des perruques d'un autre âge, d'autres des blouses blanches doctorales, et parfois même un uniforme, se sont tenus pendant six mois, raides dans leurs certitudes, devant une jeune femme de 20 ans - célibataire.

Pendant six mois, ils lui ont demandé comment, où et avec qui elle avait conçu son bébé - mort à la naissance. Le père de l'enfant n'a jamais été interrogé - c'était un homme marié.

Pendant six mois, ces hommes ont décortiqué, en public, non seulement la vie de cette jeune femme mais aussi son corps et sa tête.

L'un a décrit son vagin, l'autre a expliqué qu'elle avait pu avoir conçu des jumeaux, avec deux hommes différents, dans un délai de 24 heures.

Quand la jeune femme s'est évanouie devant ses juges, on lui a juste permis de prendre des sédatifs pour pouvoir répondre à encore plus de questions - des questions plus précises. Elle y a répondu, avec la tête qui tombait règulièrement sur le micro du tribunal.

C'était en Irlande. L'Irlande de 1985. Le pape Jean Paul II avait fait sa première visite officielle dans le très catholique pays en 1979. Le pays tout entier s'en réjouissait encore. La femme s'appelait Joanne Hayes.

On venait de trouver le corps de deux nouveaux-nés dans le Kerry. Comme cela arrivait, de temps en temps, dans l'Irlande d'alors : Grossesses cachées, mères célibataires, accouchements solitaires.

On a soupçonné Joanne Hayes d'être la mère des deux bébés - même si les tests sanguins prouvaient qu'elle ne pouvait être la mère que d'un seul.

Joanne Hayes est devenue un symbole pour les femmes irlandaises. Le pays était sous le choc. Il venait juste de sortir de décennies sombres, marquées par la poigne de fer de l'Eglise catholique.

Joanne Hayes a servi de détonateur. Et le pays a commencé à se réveiller.

Avec l'accession de l'Irlande à la communauté européenne en 1973, les femmes mariées irlandaises ont enfin pu envisager de travailler - ce qui leur était interdit jusque-là. En 1975, c'est chose faite - même si elles ne sont que 10 p.cent à le faire.

Fin des années 1980, la contraception (on parle de préservatifs, pas encore de pilule) était autorisée pour toutes - et non plus seulement pour les femmes mariées, sous certaines conditions.

Après l'affaire Joanne Hayes (1985) les enfants dits illégitimes n'étaient plus catalogués légalement comme "bâtards" et, dans la foulée, l'homosexualité n'était plus un crime.

Enfin, en 1992, l'avortement est envisagé en cas de risque pour la vie de la mère - mais seulement autorisé par la loi à être pratiqué à l'étranger.

En 1996, le divorce est légalement admis - mais sous strictes conditions.

L'ordalie de Joanne aura servi à sortir un pays de sa torpeur - doucement. L'Irlande a enfin commencé à ouvrir les yeux.

vendredi 23 avril 2010

The Liberties - le vieux Dublin de Joyce

The Liberties in Dublin.

Ancien quartier ouvrier de la capitale, les catholiques d'Irlande y trouvaient le logis - loin des quartiers bourgeois du centre-ville réservés aux Anglo-protestants, l'élite de la société d'alors.

La plupart travaillaient à la brasserie Guinness, installée en son coeur. Elle prenait la place de tout un pâté de maison - une ville dans la ville. Ses murs sont toujours là - et abritent maintenant un lieu d'expositions.





The Liberties : Le nom résonne des pas des héros de James Joyce. Le coeur du vieux quartier populaire de Dublin bat toujours au rythme des gens du peuple, courant vers leur travail, l'église ou l'école. Ils parlent maintenant avec l'accent polonais, africain, russe et dublinois. C'est la seule différence.


Les Liberties a aussi ses "personnages". Valentine est l'un d'eux. Vieux Dublinois, nostalgique du bon vieux temps. Il se souvient du temps où les chevaux étaient les rois de la ville, où l'usine Guinness tournait à plein régime pour fournir tout le pays en pintes.




Aux Liberties, la vieille coutume de se signer devant une église est toujours bien vivante.





The Liberties. Un nom bien porté pour un quartier toujours à part.

mercredi 21 avril 2010

Vol au-dessus de l'Irlande : attachez vos ceintures !

Les responsables de la crise financière doivent aller en prison !

Ceux qui ont commis des actes criminels ayant entraîné la grave crise bancaire et financière dans laquelle se débat toujours l'Irlande doivent aller en prison, "c'est certain" a déclaré, la semaine dernière, le nouveau gouverneur de la Banque centrale d'Irlande, Patrick Honohan.


Alors que la première enquête sur les causes de la crise bancaire en Irlande va débuter dans les jours qui viennent, menée par deux experts internationaux en matières financière et bancaire, le gouverneur de la Banque centrale d'Irlande a affirmé rejoindre les préoccupations de l'"homme de la rue" qui, selon un député Fine Gael (opposition), "veut voir des têtes tomber".

Patrick Honohan, le gouverneur de la Banque centrale d'Irlande, mènera d'ailleurs une enquête parallèle à celle des deux experts. Les conclusions des deux enquêtes devraient être réunies fin mai et étudiées par une commission d'enquête nationale d'ici la fin de l'année.

A la question de savoir si, selon lui, il y aurait eu certaines "activités" ces dernières années, dans le secteur bancaire irlandais qui mériteraient que des personnes soient envoyées devant le tribunal, le gouverneur de la Banque centrale répond : "Il y a certains sujets qui font actuellement l'objet d'enquêtes de la part de la Gardai (police). Je ne ferai aucun commentaire - mais il y a investigations de la part de la Gardai".


La semaine dernière, les medias irlandais annonçaient que trois des principaux responsables de banques irlandaises venaient de transférer leurs biens personnels au nom de leur épouse. Pendant ce temps, les ménages irlandais se battent de plus en plus difficilement pour faire face aux mensualités d'un prêt immobilier, consenti par ces mêmes banques, pour des sommes astronomiques, sur 30 ou 40 ans..

Ici, on parle de "prêts hindous" : des prêts que vous pourrez rembourser à votre banque sur... plusieurs vies.

mardi 20 avril 2010

Le petit-fils d'Oscar Wilde à Dublin

photo Irish Times


L'unique petit-enfant d'Oscar Wilde était, la semaine dernière, l'invité d'honneur de la ville de Dublin pour le lancement du festival international "Une ville, Un livre" - qui durera un mois.
Cette année, Dublin a choisi son auteur : Oscar Wilde ; et sa nouvelle : Le Portrait de Dorian Gray, publié en 1890.


Pendant tout le mois d'avril, Dublin va vivre au rythme de la nouvelle d'Oscar Wilde - avec force conférences, spectacles et rencontres.


La première rencontre a eu lieu le jour du lancement, avec le petit-fils d'Oscar Wilde : Merlin Holland. Après la disgrâce publique d'Oscar Wilde et sa condamnation à une peine de prison pour homosexualité, sa femme Constance changea de nom et prit celui de Holland pour éviter la honte publique.


Merlin Holland a commenté sobrement la situation : "Changer de nom ne fera pas revenir mon grand-père à la vie - et ne changera pas le fait que ma grand-mère a été malheureuse tout au long de sa vie".

vendredi 16 avril 2010

Un Irlandais sur un toit


Vous connaissez tous cette photo de Charles Ebbet (né en 1905) prise lors de la construction du centre Rockefeller à New York, en 1932 ?

C'est la pause du midi et onze ouvriers s'assoient tranquillement pour ouvrir leur lunch box. Les pieds suspendus dans le vide.

La légende veut que la majorité d'entre-eux étaient Irlandais - et les autres Indiens.

Pourquoi Irlandais et Indiens uniquement ? Parce qu'à ce qu'on raconte, les Indiens et les Irlandais ont cette chance incroyable de ne pas connaître le vertige !

Et vous savez quoi ? Je viens juste d'en avoir la preuve - de mon jardin :

Un couvreur irlandais sur le toit de la maison d'en face - prenant sa pause et fumant sa cigarette, assis sur le faîte de la maison des voisins, les pieds dans le vide et faisant des signes aux passants !

mercredi 14 avril 2010

Jean-Paul Sartre et John Huston en Irlande

The Irish Times racontait avec humour, en 2009, comment la rencontre de deux noms a pu se transformer en quelques jours en un échec éclatant.

En 1958, John Huston contacte Jean-Paul Sartre pour lui proposer d'écrire le scénario de son futur film : Freud, la Passion Secrète.


Jean-Paul Sartre



Le philosophe français accepte de collaborer avec le cinéaste américain. Durant l'année 1959, il travaille à l'écriture du scénario et, dès l'automne, se rend en Irlande afin d'y rencontrer le réalisateur qui y réside.

The Irish Times du 29 septembre 1959 relate dans ses pages la rencontre des deux hommes au manoir Saint-Clerans, Co. Galway, et titre : "Les existentialistes de Galway".


La rencontre va pourtant rapidement tourner au vinaigre. Dans une de ses lettres à Simone de Beauvoir, Jean-Paul Sartre décrit le manoir de John Huston rempli de souvenirs de voyage du maître des lieux, sans saveur et sans âme.

Le Parisien s'y plaint de n'avoir pas encore quitté cette "grande baraque" des fenêtres de laquelle il ne voit que des champs verts s'étendant sur des kilomètres alentour. Il ajoute, dégouté : "Je vais vous envoyer un télégramme car le téléphone de la chambre ne marche pas (...)".

La campagne irlandaise ne trouve pas grâce à ses yeux : "Partout où vous allez, des ruines, qui vont, sans avertissement, du 6e siècle au 20e siècle (...) Seule la présence de l'herbe prouve qu'une bombe atomique n'a pas été lâchée ici..."


John Huston



Jean-Paul Sartre n'est guère plus tendre avec son hôte, John Huston, dont il décrit à Simone de Beauvoir la "vanité enfantine" quand celui-ci se pique de porter une veste de dîner rouge ou de monter à cheval "pas très bien" (dixit Sartre) pour parcourir son domaine de Saint-Clerans.

De son côté, John Huston ressent la même antipathie pour son invité qu'il dépeint comme "aussi affreux qu'un être humain peut l'être (...) avec ses dents jaunes..."

The Irish Times raconte à ce propos que Jean-Paul Sartre, souffrant d'un mal de dent, demande à son hôte de lui trouver un dentiste à Galway. En bon Américain soucieux de ses dents, John Huston suggère d'aller à Dublin pour y trouver le meilleur des soins. Jean-Paul Sartre refuse de faire tous ces kilomètres pour une dent et va à Galway se la faire arracher. John Huston n'aura qu'un mot :"Une dent de plus ou de moins ne fait aucune différence dans l'univers de Sartre".


Le manoir de John Huston - Saint Clerans en Irlande

De retour à Paris, Jean-Paul Sartre met la dernière main au scénario du film, qui s'avère trop long. Il ne voit "aucune raison pour que le film ne dure pas huit heures", écrit-il à John Huston.

Pendant six mois, Huston et son équipe vont couper, cadrer et présenter enfin un scénario de trois heures. Sartre est furieux et exige que son nom soit retiré du générique du film. Ce qui sera fait.

Le film sortira en 1962 avec Montgomery Clift dans le rôle-titre.

lundi 12 avril 2010

L'Irlande après la Grèce ?

L''Etat irlandais a dévoilé, fin mars, son plan de sauvetage bancaire. Ce plan prévoit la nationalisation de cinq des plus importantes banques d'Irlande. L'annonce a fait grincer bien des dents mais, comme le souligne le ministre irlandais des finances, Brian Lenihan, "c'est la moins pire des solutions" à apporter au problème irlandais.



Contrairement aux autres banques européennes, qui ont réussi à rembourser les aides publiques en 2009, les banques irlandaises se débattent toujours avec les conséquences des deux crises majeures simultanées qu'a connu l'Irlande, ces dernières années : la crise financière mondiale et l'éclatement de sa bulle immobilière et de crédit.



Le PIB irlandais a chuté de 13 p.cent par rapport à 2007 et le taux de chômage atteint, en mars 2010, 13,4 p.cent de la population active. Le taux d'endettement des ménages ayant enflé de 60 p.cent à 150 p.cent en 10ans, les banques doivent aujourd'hui faire face à une multiplication des défauts de remboursements (crédits immobiliers, crédits à la consommation, etc). L'Irlande est l'un des pays dévoloppés les plus touchés par la crise internationale. Et le gouvernement ne prévoit un retour de la croissance qu'au deuxième semestre 2010.



C'est aussi le pays qui a réagi face au problème le plus vite et le plus drastiquement. Dès 2008, le gouvernement irlandais mettait en oeuvre un plan de sauvetage prévoyant réductions de salaires, réductions des allocations sociales et hausses des impôts. Toutefois, l'impôt sur les sociétés, moteur important de l'économie irlandaise, restait intouché.



Le pays a ainsi pu éviter la crise politico-financière que connaît actuellement la Grèce. De plus, il faut noter que la dette publique de l'Irlande reste inférieure à la moyenne de l'Union européenne : elle était de 64, 5 p.cent fin 2009 - bien plus faible que celle du Portugal, de l'Italie ou de l'Espagne. Et même inférieure à celle de la France ou de l'Allemagne.



Il n 'empêche que cette recapitalisation des banques irlandaises et la création d'une "bad bank" (NAMA) - qui va racheter aux banques pour 81 milliards d'euros de leurs créances douteuses - passent mal auprès des contribuables et des partis d'opposition irlandais. L'Union européenne, qui avait déjà félicité l'Etat irlandais pour son plan d'austérité, devrait approuver ce plan de sauvetage bancaire dans les jours qui viennent.

Quand les Irlandais explosent à la TV - et en direct



C'était en novembre 2009 - juste après le lancement du plan d'austérité décidé par le gouvernement irlandais (diminution des salaires, réduction générale des allocations sociales, hausse des impôts - sauf pour les sociétés).

A noter : à aucun moment, la télévision nationale RTE (qui diffusait le débat avec la ministre) n'a interrompu l'homme (déchaîné).

samedi 10 avril 2010

The Young Dubliners chantent l'Irlande - Foggy Dew



Alors, Renaud ou les Young Dubliners ?

vendredi 9 avril 2010

jeudi 8 avril 2010

Le "vrai" portrait de Shakespeare retrouvé en Irlande




Le véritable portrait de William Shakespeare, peint de son vivant, serait resté accroché durant des années au château de Newbridge à Donobate, en Irlande - sans que personne ne le reconnaisse. Telle est, en tout cas, l'annonce que Alec Cobbe, un restaurateur d'art et descendant de la famille à qui le château a appartenu pendant 250 ans, a faite en mars 2009.


Alec Cobbe a reconnu le portrait grâce à une exposition, à Londres, sur les différents portraits, véritables ou supposés, de Shakespeare. Celui qui a attiré son attention a été peint par Janssen au 17e siècle et aurait, selon lui, des ressemblances avec le portrait de la famille Cobbe.

William Shakespeare a été baptisé en 1574 à Stratford-upon-Avon et est mort en 1616. Marié, père de trois enfants, il commence sa carrière à Londres comme écrivain et acteur. On sait très peu de choses sur sa vie - à l'exception de son oeuvre. Et encore, certains pensent qu'un "collectif" aurait pu signer sous son nom.


Selon le Britain's National Portrait Gallery, un nouveau portrait de Shakespeare est découvert tous les cinq ou dix ans. Un des administrateurs du National Portrait Gallery a déclaré au Guardian que les portraits Cobbe et Janssen, si ressemblants, pourraient en fait être celui d'un autre homme, Sir Thomas Overbury.

Alec Cobbe, lui, a déjà son opinion. Il a déclaré au Irish Times à propos de la polémique naissante : "Tout le monde va dire : "N'importe quoi. Ce n'est pas Shakespeare du tout" - mais je ne vais pas nécessairement les croire."

mardi 6 avril 2010

Les Travellers d'Irlande



La communauté des Travellers d'Irlande a connu un taux de suicide cinq fois plus important que la population sédentaire en 2005. Le risque de suicide est trois fois plus élevé chez eux que chez les autres Irlandais. C'est ce que révèle une étude conduite par le ministère irlandais de la justice entre 2000 et 2006 et publiée en 2008.



Les Travellers sont les Gitans d'Irlande. Enfin pas tout à fait puisque sous l'empire britannique, les scientifiques les avaient classés dans la dernière catégorie de la hiérarchie coloniale sociale - après les castes d'Inde. La société post-coloniale irlandaise est toujours restée sur cette image du Traveller ("voyageur, itinérant" en français) hors caste.


Le racisme anti-Traveller existe en Irlande. Il se fait souvent sentir de manière forte. L'exclusion en est la principale manifestation. Les Travellers se voient facilement interdire l'accès aux pubs, aux restaurants et dans certains magasins .Des écoles leur sont réservées mais l'enseignement qu'on y pratique ne correspond ni à leur langue, ni à leur culture.

Les Travellers ont toujours été perçus comme les "colonisés des colonisés" en Irlande. Que ce soit par les Britanniques ou par les Irlandais eux-mêmes.





Leurs origines remonteraient à plus de huit siècles lorsque des communautés ont commencé à se détacher du groupe pour vivre en nomades. Les paysans chassés de leurs terres par les troupes de Cromwell au 17e siècle puis les survivants de la Grande Famine de 1845 auraient ensuite rejoint ces groupes de populations itinérantes.

Les Travellers ont au cours des siècles développé une culture avec ses rites, ses activités et sa langue propres. Ils ne parlent pas anglais entre eux. Ni gaélique. Ils parlent le sherta (ou gammon ou cant), une langue qui n'est évidemment pas reconnue par le gouvernement irlandais. Pas même comme dialecte.





Dans les années 1960, les autorités irlandaises leur ont imposé la sédentarisation dans des quartiers vite devenus des ghettos. Les Travellers souffrent des mêmes clichés que ceux dont souffrent les Gitans d'Europe : voleurs, paresseux, violents. Leur intégration à la société irlandaise reste très difficile. Le désespoir a remplacé la fierté des origines.






L'alcool aide à accepter un mode de vie sédentaire qui les empêche de pratiquer leurs métiers traditionnels (ferrailleurs, pour la plupart - les Tinkers). L'alcool aide aussi les hommes devant les insultes des "sédentaires" qui les accusent de profiter du système d'aide sociale - puisqu'ils ne peuvent plus travailler comme ils l'ont toujours appris.

L'alcool permet aussi de supporter le mépris des institutions quand leurs caravanes arrivent devant des terrains jusque là réservés à leurs campements et dont l'accès est désormais impossible.

Chez les Travellers, le risque de suicide chez les hommes est neuf fois plus élevé que chez les femmes.

dimanche 4 avril 2010

samedi 3 avril 2010

Tristes enfants d'Irlande

"Si tu n'es pas sage, on t'envoie chez les religieux !" Jusqu'en 1990, les enfants d'Irlande l'ont tellement entendue cette phrase. Les parents à bout en usaient comme ailleurs on usait du méchant croquemitaine. Car tout le monde savait. Indeed. Et tout le monde laissait faire - l'Etat le premier.


C'était l'époque des couvents des Magdalena Sisters oû les "mauvaises femmes" étaient enfermées - parfois âgées de 15 ou 16 ans. C'était l'époque de la toute-puissante Eglise catholique d'Irlande. Et de son jumeau, l'Etat irlandais.





L'Eglise catholique est toujours très influente en Irlande - en tout cas sur les esprits. Mais le changement se fait déjà sentir. Un léger recul, des têtes qui se redressent - prudemment. Il n'empêche : le mouvement est là. Et l'Etat suit - tout aussi prudemment.


Le rapport de la commission d'enquête sur les mauvais traitements infligés à des enfants a été rendu public par le juge de la Haute Cour. La nouvelle a aussitôt fait le tour des médias. Et le choc pourrait bien ébranler un peu plus l'assise de l'Eglise catholique en Irlande. Enfin peut-être.

A la télévision nationale RTE, un homme témoigné il y a plusieurs semaines. Il a parlé de "camps de contentration" pour enfant. Il a même précisé : "Noel était un jour béni : c'était le seul jour où on était sûrs de ne pas être violés".



Les témoins ont maintenant entre 50 et 80 ans. Tous racontent le climat de peur et de violence qui règnait dans ces institutions pour enfants "difficiles" : enfants de mères célibataires - elles-mêmes mises au ban de la société irlandaise - ou issus de milieux défavorisés.

On estime à environ 30.000 le nombre d'enfants envoyés dans ces institutions de redressement tenus par l'Eglise catholique, entre 1930 et 1990. Les garçons chez les Frères chrétiens, les filles chez les Soeurs de la Miséricode. Les filles étaient continuellement soumises aux humiliations et insultes. Les garçons aux viols.



Les Soeurs de la Miséricode ont déclaré ressentir "une grande tristesse". Le porte-parole des Frères chrétiens a admis qu'"il était difficile de ne pas ressentir de la honte".


Mais ce qui choque le plus les Irlandais - au-delà des calculs d'indemnités pour les victimes qui acceptent en contre-partie de ne pas poursuivre l'Etat et l'Eglise - c'est le long silence de l'Etat irlandais. Un Etat qui jusqu'au bout s'est efforcé de bloquer les enquêtes et les procédures de justice. Un Etat qui jusqu'au bout a cru pouvoir fermer les yeux.

vendredi 2 avril 2010

L'Histoire d'Irlande revue par les Anglais



Soulèvement de Pâques 1916 - Et répression britannique


Encyclopedia Britannica, l'encyclopédie la plus lue et la plus réputée dans le monde anglophone, vient d'admettre qu'une erreur de taille s'était glissée dans les pages consacrées à l'histoire d'Irlande, écrites il y a sept ans. Le directeur général d'Encyclopaedia Britannicas'est empressé d'affirmer que l'erreur serait corrigée dans la nuit et présentait ses excuses aux Irlandais.


Le chapitre incriminé est censé expliquer aux lecteurs, et aux écoles abonnées à l'Encyclopaedia, les tenants et les aboutissants d'une page extrêmement complexe de l'Histoire irlandaise : celle de la guerre civile qui a suivi le traité d'indépendance de 1921, signé entre les Britanniques et les forces irlandaises.

L'accord prévoyait certes l'indépendance d'un nouvel Etat libre d'Irlande (Free State) mais pour seulement 26 counties (régions) d'une île qui en comptait 32.



Les six counties du Nord devaient être rassemblés sous le nom d'Irlande du Nord (ou encore Ulster) et rester sous domination britannique - ceci pour des raisons historiques liées au peuplement à majorité protestante.

Encyclopaedia Britannica a tout simplement "oublié" de mentionner le rôle de la Grande-Bretagne dans la guerre civile qui a suivi cette partition de l'île, imposée par Londres. Elle a résumé toute l'affaire en une guerre entre Catholiques du Sud et Protestants du Nord.



Cette page de l'histoire irlandaise est toujours un sujet délicat à aborder en Irlande. Des familles ont été déchirées, des frères sont devenus ennemis jurés. Le pays tout entier s'est battu "pour" ou "contre" un traité qui donnait l'indépendance tant rêvée - mais l'indépendance imposée aux conditions de l'ancien colonisateur.



Se battre jusqu'au bout pour garder l'unité de l'île, au risque de voir l'armée britannique revenir envahir le pays ? Ou accepter la partition, devenir libres et indépendants et se battre ultérieurement pour une réunification complète ? Le film Michael Collins peut aider à nous faire comprendre l'Irlande de ces années de lutte.



Le directeur de l'Encyclopaedia Britannica a affirmé, hier, qu'il s'agissait d'une erreur faite par un rédacteur inexpérimenté qui a voulu trop simplifier une Histoire complexe. Il a ajouté que "cela était très rare".




Et il fallait que ça tombe sur l'histoire d'Irlande (ré)-écrite par les Britanniques !

jeudi 1 avril 2010

La crème de jour des machos irlandais

En Irlande, les hommes semblent - enfin - avoir compris ce que les femmes recherchent. Une toute récente étude de l'université d'Aberdeen vient de leur donner confirmation de ce qu'ils sentaient déjà : les femmes de 2010 préfèrent les "hommes féminins" - des hommes qui prennent soin de leur peau et de leur silhouette.

Exit donc, le beer belly fièrement exhibé sous une chemisette trop étroite et le cheveu rasé de peur de montrer une calvitie précoce. L'homme irlandais nouveau prend désormais soin de son apparence. Et il revient de loin.


Cian McDonald, le directeur de Grooming Rooms à Dublin l'affirme dans le très sérieux Irish Times : les hommes irlandais ont été (quelque peu) plus lents que leurs camarades du continent à prendre conscience que, eux aussi, devaient faire des efforts pour séduire leurs bien-aimées. Précisons que l'homme irlandais moyen est une survivance du machisme intégré par l'ensemble de la société, femmes comprises. L'homme n'a rien à prouver - surtout en matière de séduction.


Mais ces temps sont révolus. L'homme irlandais vient de découvrir les bienfaits de la crème de jour et du masque facial. Le directeur de Grooming Rooms précise : "Les Irlandais ont été un peu plus lents à réagir. Les Italiens et les Français se préoccupent plus de leur apparence et je pense que tout le monde veut maintenant donner une bonne impression. Pas besoin pour cela de sacrifier votre sexualité."


Car là est le problème pour l'homme irlandais. Comment garder son identité virile tout en mettant sa crème de nuit avant le coucher ? L'Oréal - en pleine expansion sur le marché irlandais - a trouvé la parade : sponsoriser l'équipe nationale irlandaise de rugby.


L'effet a été immédiat : même en pleine récession économique, le marché des cosmétiques pour hommes a explosé en Irlande. La compagnie Grooming Rooms a vu sa part de marché passer de 7 p.cent à 20 p.cent en deux ans. Et espère bien l'augmenter encore dans les années à venir.


Désormais, l'homme irlandais ose entrer dans un supermarché pour acheter sa crème anti-cernes et le parfum dernier cri. Du moins à Dublin et alentours. Dans le fin fond du Kerry ou du Donegal, il faudra encore attendre un peu.

Bonjour de Dublin !

L'Irlande vue de Dublin. L'air y est frais. Le soleil rare mais toujours chaleureux. Et les Irlandais formidables - même sous la pluie.

Welcome !