lundi 21 mai 2012

Féminisme "à l'Irlandaise"



Dans un pays où l'avenir des femmes se joue généralement entre la cuisine familiale et l'école des enfants, la première conférence du Irish Feminist Network fait figure de révolution.

Tenue ce week-end à Dublin, la conférence a laissé la parole à plusieurs figures du mouvement féministe irlandais - bien différent des féministes "à la Française".

En Irlande, tout est à inventer - et le chemin est long et ardu. Le rôle et le poids de l'Eglise catholique dans le système scolaire et l'organisation du pays n'y est pas pour rien. La société irlandaise s'inspire également d'un certain modèle anglo-saxon où les hommes et les femmes ont coutume de vivre de façon séparée leurs activités "sociales" : clubs de golf, de lecture, sorties au pub ou au restaurant, etc.

Plusieurs points peuvent être retirés de la conférence du Irish Feminist Network.

1 - Les féministes irlandaises refusent de se laisser dicter leur manière de s'habiller et/ou de se maquiller. A l'instar de Hillary Clinton qui, courageusement la semaine dernière, a osé défier les codes en vigueur en se présentant face aux caméras sans fond de teint. Ce qui lui a valu une déferlante d'articles pas toujours aimables dans les médias américains. Il faut préciser ici que les femmes anglo-saxonnes ont une prédilection marquée pour la brosse et le pinceau - voire la truelle.

2 - Les féministes irlandaises revendiquent le choix de leur vie. Comme elles le soulignent, les Nations Unies ont défini avec précision l'une des bases essentielles des droits humains : "choix volontaire du mariage, de la taille de la famille et droit à l'accès aux informations nécessaires à ce choix". La taille d'une famille irlandaise moyenne se situe généralement entre trois et quatre enfants sur cinq ans.
Rappelons que, comme le souligne une intervenante de la conférence, "les femmes irlandaises n'ont pas accès à un avortement médicalement assisté et légal dans leur propre pays - même si cela peut aider à sauver leur vie." Selon la Constitution irlandaise, elles n'ont que le droit à voyager pour subir un avortement à l'étranger.


3 - Les féministes irlandaises réclament une meilleure visibilité des sports féminins dans les médias. Il faut dire que seuls les matches de football ou de rugby ont droit de cité en Irlande. A tel point que les jeunes filles se tournent d'elles-mêmes vers les sports "masculins" où elles tentent de copier les garçons en tout points.

4 - Les féministes irlandaises veulent la généralisation des crèches et des écoles maternelles - qui sont toutes privées pour le moment. C'est là un point essentiel pour l'émancipation des femmes qui n'ont d'autres choix que de rester à la maison pour s'occuper des enfants si le couple ne veut pas dépenser presque la totalité du deuxième salaire en frais de garde. Sans parler du mode quasi-discriminatoire d'un système d'imposition qui pénalise les couples au travail.


5 - Les féministes irlandaises affirment... que le sexe est meilleur entre égaux. Et concluent : "Voici une bonne raison d'être féministes !"

4 commentaires:

  1. Bon alors si le fait de ne pas mettre de fond de teint est un acte féministe, en effet, elles ont beaucoup de chemin à faire les filles...
    C'est désolant qu'Hillary soit jugé sur ça, ahurissant...
    Elles ont du boulot les filles! La société irlandaise est tellement conformiste....
    En 92 mon boy friend n'osait pas dire à ses potes que nous vivions ensemble (dans le pécher)et j'ai vu plus d'une de ces amies me regarder avec mépris quand JE les mettais au jus! En 1992!!! Mai 68 n'était toujours pas passé par Dublin... Misère!

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  2. Non seulement mai 68 n'est jamais passé par l'Irlande mais la société irlandaise n'a pas connu non plus les bouleversements de l'industrialisation et des deux guerres mondiales (heureusement pour eux, en un sens)qui ont eu des répercussions importantes sur l'émancipation des femmes en France comme en Grande-Bretagne et aux USA.
    Et même en 2012, on peut toujours en voir les conséquences ici. Le statut de la femmes mariée (euh... de la mère, je devrais dire) est sacré. Elle est d'ailleurs super-protégée par la Constitution irlandaise. Ce qui, quelque part, n'aide pas à l'émancipation des femmes qui se voient dotées d'un quasi-salaire maternel et de droits sur les enfants et la "maison familiale" très importants.

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  3. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  4. Pour illustrer mon propos sur les sportives "féminines", voici une lettre de lectrice du Irish Times publiée aujourd'hui :

    Sir, – At last, in recent days, Katie Taylor is getting some of the media attention that she deserves. All she had to do was to win five European and four world championships, as well as qualifying for the Olympics by the age of 25.

    I was puzzled to read Ronan McGreevy’s description of her as “elfin-like” (“Amazing welcome for boxing queen”, May 21st). What was he expecting? Mike Tyson without the Y chromosome?

    At 5ft 7in, Katie Taylor is taller than the average Irish woman by several inches. She is no shorter than Bernard Dunne, Paddy Barnes and John-Joe Nevin and she boxes in a higher weight class.

    I imagine her opponents felt nothing delicate or “elfin-like” in her punches. Can’t we just celebrate the strength, power and athleticism of sports women without the implied amazement that they still manage to look feminine? – Yours, etc,

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